Mais que s’est-il donc passé à Chypre pour en arriver à spolier la propriété privée ?

  1. On le sait depuis longtemps : Chypre est une usine à blanchir l’argent russe : les dépôts bancaires représentant 4 à 8 fois le PIB selon les sources (en France, c’est 0,9 fois).
  2. Le 1er mai 2004, l’UE s’est faite plaisir en intégrant cette belle île méditerranéenne malgré la « criminalisation » de son économie. C’est le coté impérialiste des dirigeants européens qui ressort : faire rentrer le plus de monde possible, même si ça va être douloureux.
  3. Par application du principe fondamental européens de libre circulation des biens, Chypre a servi de point d’entrée pour l’argent sale sur tout le continent. C’est la qu’on réalise que l’intégration de Chypre fut une « fausse bonne idée » !
  4. Cet argent douteux est bien sûr mélangé dans les structures financières de l’île à l’épargne de tous les chypriotes.
  5. Pour agrémenter la situation, le soleil et la fiscalité aidant, pas mal de ressortissants européens sont venus prendre leur retraite sur place (en particulier les anciens colonisateurs : les britanniques). Conséquence : dilution d’argent propre dans un système financier infecté.
  6. Enfin, dernière condition pour ce grand dérapage incontrôlé : des liens plus qu’étroits entre l’économie chypriote et celle de la Grèce. Sa grande sœur hellénique entraînant Chypre dans sa chute.
  7. Quel dérapage ? la faillite des banques chypriotes si rien n’est fait, qui se concrétisera par un « bank run » (retraits massifs par les dépositaires, les épargnants chypriotes) à la prochaine ouverture des banques.
  8. Le week-end dernier, nos dirigeants européens prennent enfin le problème à bras le corps. Trois voies s’offrent à eux :
    1. soit on laisse les banques chypriotes faire faillite (façon Lehman Brothers)
    2. soit on renfloue les banques chypriotes sans trop se poser de questions : un cadeau de 17,4 milliards d’€ qui va surtout profiter aux mafias russes (façon dette grecque mais pour aider des gens qui n’ont pas du tout besoin) ;
    3. soit on va chercher l’argent où il y en a : c’est à dire sur les dépôts bancaires, sous forme d’une taxe sur les montants déposés : ce qui revient à voler directement les épargnants (russes, chypriotes et britanniques)

Photo : shilmar / CC0 1.0

Photo : shilmar / CC0 1.0

Pour l’instant nos dirigeants ont privilégié la troisième solution et ainsi le message est clair :
« Vous avez voulu profiter de notre petit paradis fiscal, il vous faut à présent en assumer les risques !« 

Le problème est que l’argent, ce n’est que de la confiance. Rien de plus.
Celle qu’on attribue à un bout de papier imprimé (billet de banque) ou à quelques lignes de codes dans des ordinateurs.
Alors quand l’Europe vient piquer sur les comptes bancaires, ça ne rassure pas du tout.

Quel fâcheux précédent de la part de l’Europe !
Et même si nos dirigeants reviennent en arrière, ce qui semble le cas à présent, le mal est fait.

Le pire d’en tout ça, c’est que je ne crois pas que cette décision fut prise à la légère.
Je pense même qu’elle fait parti du petit jeu de la négociation en cours entre l’UE et la Russie.
Prélever sur les dépôts bancaires est en réalité assez peu réalisable :

  • disposition soumise au vote des députés chypriotes ce mardi et immédiatement rejetée (ce mardi, aucun députés n’a voté pour)
  • contre le principe fondateur européen du droit à la propriété privée (ce qui conduit directement à la Cour de Justice de l’UE !)
  • et enfin, entre sa décision réelle et son application, le risque de voir l’argent fuir Chypre avant toute

Ainsi, ma conviction est que l’Europe à voulu faire passer le message :
« Regardez jusqu’où on est capable d’aller ! »

Qui sait, peut-être que d’ici peu, on discutera même de la sortie de Chypre de la Zone Euro.
Une solution efficace… pour repartir (plus ou moins) à zéro !